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Surendettement : l'urgence du fichier positif ?

Le surendettement en France ne faiblit pas. Nourri par les effets néfastes de la crise, le fléau creuse profondément les stigmates de la pauvreté sur les plus fragiles. Dans un rapport remis mardi au Sénat, la fédération CRESUS (Chambre Régionale de Surendettement Social) dénonce une situation alarmante depuis deux ans et réclame la création d'un fichier positif recensant tous les crédits détenus par les particuliers. Le fichier national des crédits aux particuliers, une Arlésienne qui refait surface au gré des gouvernements, mais qui se heurte chaque fois à des motifs éthiques. Pourtant les clivages habituels (banques contre consommateurs, droite contre gauche) cèdent quand il s'agit d'aborder le sujet.

Présenté comme une parade au surendettement, le fichier positif ou répertoire de tous les crédits détenus par des particuliers serait interrogé par tous les organismes de crédit avant d'octroyer un prêt. Il recenserait les données personnelles du client, son taux d'endettement, ses crédits en cours et ses éventuels incidents de paiement. Il serait le revers positif du fichier FICP, géré par la Banque de France, qui n'enregistre que les données négatives des particuliers ayant des difficultés de paiement (2,5 millions de personnes y sont enregistrées, soit 3,4 millions d'incidents de paiement, la plupart liés à l'usage de crédits à la consommation). Les organismes de crédit ont donc entre les mains un outil pour apprécier la solvabilité des personnes sollicitant un crédit. Le FICP doit être obligatoirement consulté avant tout octroi d'un crédit et avant reconduction d'un crédit renouvelable.

Contre

Jusqu'à présent, les partisans du non ont réussi à faire valoir leurs arguments contre la création d'un fichier positif. Premier opposant, la CNIL qui met en avant l'atteinte à la vie privée des consommateurs. L'UFC-Que Choisir est également contre pour cette même raison, mais aussi pour le formidable outil marketing que représenterait ce fichier, accessible aux opérateurs professionnels pour promouvoir le crédit auprès de personnes ayant une capacité d'endettement. Ajoutons que ce fichier ne peut en aucun cas présumer de l'avenir en fournissant uniquement des données du passé ; un contrat de crédit est un pari sur le futur, les accidents de la vie (divorce, chômage, décès,...) qui entraînent souvent des difficultés financières sont imprévisibles. En optant pour le fichier positif dès 2003, la Belgique n'a pas pour autant réussi à juguler la montée du surendettement.

Pour

En face, on compte des acteurs favorables au fichier positif : l'UNAF (Union Nationale des Associations Familiales) et la fédération CRESUS qui monte au créneau par le biais du rapport remis au Sénat. Déjà en août 2011, le comité de préfiguration du registre national des crédits avait rendu un rapport préconisant la mise en place d'un tel fichier pour remplacer in fine le FICP. Les défenseurs du fichier trouvent dans l'actualité, il est vrai, des arguments de poids : la crise des subprimes aux USA, et la situation économique actuelle qui fragilise les plus modestes et fait glisser doucement les mal-dendettés vers le surendettement. Le député centriste Jean-Christophe Lagarde est le dernier élu en date à exhumer le dossier. Mi-septembre il a déposé un proposition de loi visant à lutter contre le surendettement via la création d'un fichier positif. Le texte prévoit que l'établissement de crédit soit rendu responsable de la non-solvabilité du souscripteur en cas de non-vérification du fichier. L'organisme ne pourrait alors engager aucune procédure de recouvrement sauf si l'emprunteur a fourni de fausses informations. C'est la quatrième fois depuis 2002 qu'un tel texte est présenté.

Les arguments des uns valent ceux des autres. Le débat passionné autour de la création du fichier positif témoigne de la nécessité de trouver un outil efficace pour lutter contre le surendettement. Sur ce point le consensus est réel. Il ne fait également aucun doute que des solutions pour protéger les consommateurs, tout en permettant aux établissements de crédits d'agir en toute transparence sans bloquer l'accès au crédit existent.



Noémie Palussière

Par , le mardi 30 octobre 2012

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