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Investissement locatif : quand un dispositif fiscal conduit au surendettement.

La loi Scellier mise en application en janvier 2009 a très largement contribué à la relance du secteur immobilier touché par la récente crise financière. On estime que 63% des logements neufs acquis en 2010 l'ont été dans le cadre de ce dispositif. Depuis plusieurs années, le gouvernement concocte des mesures incitatives destinées à soutenir un secteur dont la vigueur est toujours l'image de la santé économique de tout le pays : lois Boorlo, de Robien, Besson dont l'année 2010 a sonné le glas et qui ont été remplacées par la loi Scellier pour rendre le principe plus efficace. De nombreux investisseurs se sont laissés séduire par les promesses d'économie d'impôt, et par des promoteurs peu scrupuleux qui leur faisaient miroiter des rendements élevés, mais surestimés au regard du marché locatif concerné. Aujourd'hui, ces ménages abusés seraient plus de 100 000 à se trouver en grande difficulté financière.

Le dispositif Scellier permet à tout investisseur de bénéficier d'un crédit d'impôt équivalent à 22% du prix d'un bien neuf (bâtiment BBC en 2011, 13% pour un logement non-BBC) sous réserve de le louer durant neuf années consécutives et ce, dès la première année d'acquisition. Le taux était plus attractif en 2009, lors du lancement du dispositif avec 25% de défiscalistation sans distinction quant aux normes liées à la construction. Le succès fut au rendez-vous, mais le Scellier a laissé transparaître dès les premiers mois des dérives semblables au dispositif de Robien qu'il était sensé corriger : logements construits dans des zones où la demande locative est insuffisante, loyers trop élevés par rapport au marché et au final des propriétaires incapables de rembourser les mensualités de leur emprunt pour cause de logement vacant ou de loyers fortement revus à la baisse.

Plusieurs enquêtes (UFC-Que Choisir, cabinet Immogroup Consulting) avaient pointé du doigt certaines villes stigmatisées par des constructions en totale inadéquation avec une réalité locale difficile (peu de demande locative, économie sinistrée) : Carcasonne taxée de scandale "Robien", mais aussi certaines grandes villes de l'Est (Nancy, Mulhouse) ou encore Clermont-Ferrand et Montauban. La leçon n'eut pas valeur d'exemple pour le Scellier, puisque d'autres villes, grandes et moyennes, ont subi les dérives de promoteurs inconsistants : Alès, Castres, Bourges, Roanne, Argenteuil, Les Mureaux, Ivry ou Saint-Denis pour ne citer que celles-là.

Les ménages malheureux, incapables de faire face à leurs échéances de remboursement, seraient au nombre de 100 000 sur un total de plus de 500 000 investisseurs en logement locatif depuis 2004. Le surendettement lié à l'immobilier prend des proportions croissantes en passant de 7% du nombre de dossiers en 2006 à 10% en 2010.Triste constat quand l'heure est à la recherche systématique de revenus supplémentaires pour palier au manquement du régime général des retraites. L'Etat a déjà quelque peu rectifié le tir en 2011 en conditionnant le bénéfice fiscal maximal à l'achat d'un logement BBC, en modifiant le zonage et abaissant les plafonds de loyers.

Si vous souhaitez investir dans le cadre de la loi Scellier, prenez toutes les précautions nécessaires en vous rendant sur les lieux où le bien sera construit, en visitant le bien s'il est déjà achevé, et en vous renseignant sur le promoteur auprès d'un spécialiste de l'immobilier (notaire, avocat fiscaliste) pour confirmer la probabilité des rendements.