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Crédit immobilier : les gagnants et les perdants des taux bas

Crédit immobilier : les gagnants et les perdants des taux bas

Les taux d'intérêts n'ont jamais été aussi bas, ce qui minimise le coût d'un crédit immobilier. La période est on ne peut plus favorable à tous ceux qui souhaitent devenir propriétaires ou investir. Malheureusement, certains profils ne peuvent en profiter. Encore un paradoxe à la française qui exclut certains dossiers malgré leur solvabilité.

Record des taux à la baisse

Impossible d'ignorer cette info. Les taux ont atteint leur seuil plancher en juin dernier, rejetant aux oubliettes le record de l'automne 2016. Le taux moyen toutes durées confondues s'est établi à 1,25% (hors assurance), un record qui pourrait tomber en juillet (données Observatoire Crédit Logement/CSA). Actuellement, il est courant d'emprunter sur la durée classique de 20 ans sous 1%, ce qui n'a jamais été observé dans le passé. En quatre ans, les taux ont été divisés par deux ! En tenant compte de l'inflation (1,20% sur un an à fin juin), s'endetter ne coûte quasiment rien, ce qui ouvre la voie aux ménages modestes, désormais resolvabilisés grâce à ces conditions exceptionnelles. Tout en respectant le taux d'endettement maximum de 33%, les foyers à revenus moyens et/ou avec un faible apport, notamment les jeunes actifs, peuvent accéder à la propriété en empruntant sur des durées longues. En juin, près de 83% des emprunteurs de moins de 35 ans ont contracté un prêt d'une durée supérieure ou égale à 20 ans, et plus de la moitié de cette tranche d'âge s'endette sur 25 ans et plus. 72,3% des prêts à l'accession courent sur 20 ans et plus, amenant le poids des durées longues à un niveau inégalé.

La faute aux taux de l'usure

Ce qui semble être la fenêtre idéale pour tous reste paradoxalement fermée à certains profils en raison du principe des taux de l'usure, ces taux maximum légaux que les établissements de crédit sont autorisés à pratiquer quand ils accordent un financement. Différents selon les catégories de prêts, ils sont publiés chaque trimestre et calculés à partir des taux effectifs moyens pratiqués le trimestre précédent, augmentés d'un tiers. Pour les crédits à l'habitat, ils varient selon la durée. Mécaniquement, plus les taux d'intérêts pratiqués baissent, plus les seuils de l'usure se contractent. C'est le cas depuis début 2019. Les taux de l'usure applicables depuis le 1er juillet 2019 s'établissent comme suit :

  • Prêts à taux fixe d'une durée inférieure à 10 ans : 2,72%
  • Prêts à taux fixe d'une durée comprise entre 10 ans et moins de 20 ans : 2,79%
  • Prêts à taux fixe d'une durée de 20 ans et plus : 2,97%
  • Prêts à taux variable : 2,47%
  • Prêts relais : 3,16%

Ces taux maximum servent à protéger l'emprunteur d'éventuels abus. Sauf que le coût d'un crédit immobilier ne se limite pas aux intérêts d'emprunt. Le taux de l'usure renvoie au TAEG, taux annuel effectif global, qui comprend le taux nominal, mais aussi tous les frais annexes exigés du prêteur pour l'obtention du prêt :

  • frais de dossier,
  • frais d'ouverture et de tenue de compte,
  • frais de courtage,
  • frais de garantie (hypothèque, caution, privilège du porteur de deniers),
  • frais d'expertise du bien,
  • primes d'assurance.

Il faut donc se référer au TAEG pour apprécier si l'offre de prêt excède le seuil usuraire.

Ces profils exclus de l'accès au crédit

Ce système des taux de l'usure, censé protéger les emprunteurs, se retourne contre certains profils en dépit d'une situation financière conforme aux critères de solvabilité. En cause, l'assurance emprunteur qui pèse de plus en plus lourd dans le coût d'un crédit. Son poids peut représenter un tiers du coût global, voire plus pour les profils à risque. Il n'est pas rare que l'assurance coûte autant que les intérêts d'emprunt en cas de risques aggravés de santé ou de professions délicates d'un point de vue assurantiel (pompier, gendarme, policier, pêcheur, métiers du bâtiment,...).

Le courtier Meilleurtaux illustre, exemples à l'appui, ces situations où la demande d'emprunt s'est malheureusement soldée par un échec. Voici celui d'un couple, mari pompier âgé de 58 ans, épouse gérante salariée d'un salon de coiffure âgée de 53 ans, souhaitant emprunter plus de 400 000€ sur 20 ans au taux nominal de 1,20%, avec un apport substantiel. En assurant le capital à la quotité de 75% sur chaque tête, le taux d'assurance (0,65% et 0,49% respectivement) ne leur permet de rester dans la limite de l'usure (2,97%).

Ce cas n'est pas isolé et témoigne de l'effet pervers des taux bas. Depuis plusieurs semaines, les courtiers se mobilisent, réclamant une nouvelle méthode de calcul des taux de l'usure qui permettrait de ne pas exclure du crédit immobilier les ménages pourtant en capacité d'emprunter.



Gerard Mihranyan

Par , le lundi 29 juillet 2019

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