Surendettement : Crésus réclame la création d'un fichier national des crédits.
Le problème du surendettement revient douloureusement dans l'actualité avec le suicide, la semaine dernière, d'un sexagénaire qui avait auparavant tué les membres de sa famille. Cet homme n'avait pas trouvé d'autre issue face à une situation alarmante. La fédération Crésus dont 117 associations d'aide aux personnes surendettées essaiment partout en France réclame ardemment la création d'un registre national du crédit des particuliers qui recenserait tous les détenteurs de crédit(s) en cours. Aujourd'hui le gouvernement par la voix de la ministre de l'Economie Christine Lagarde s'oppose à la mise en place de ce fichier positif.
Le débat sur la création d'un fichier servant de base de données sur tous les Français détenteurs d'un crédit, avec ou sans incident de paiement, a été vif l'an passé au moment du vote de la réforme sur le crédit. Souhait de certaines associations de consommateurs et de Crésus, ce fichier aurait pour objectif de renseigner la banque sur les données personnelles du client, son taux d'endettement, ses crédits en cours (immobilier, consommation, découvert bancaire, ) et sur d'éventuels incidents de paiement. L'organisme de crédit déciderait d'octroyer le crédit en connaissance de cause et refuserait déontologiquement tout prêt à une personne déjà trop endettée. Or, existe déjà le FICP, fichier des incidents de paiement des particuliers géré par la Banque de France. La CNIL, par ailleurs, s'est vivement opposé à la création d'un fichier positif au motif qu'il porterait atteinte à la vie privée. Les banques, de leur côté, sont farouchement et logiquement contre ce fichier.
Un grand nombre de députés avait pourtant soutenu le projet d'un fichier positif. Le débat n'aura finalement conduit qu'à la mise en place d'une instance de préfiguration qui réfléchit pour 12 mois à la création d'un répertoire national des crédits aux ménages. Le FICP recense déjà quelque 2,6 millions d'emprunteurs ayant des difficultés de remboursement. Un fichier national des crédits aurait à lister environ 9 millions de personnes, mais permettrait de contrôler la distribution du crédit en portant à la connaissance des établissements prêteurs l'ensemble des crédits et dettes de chacun : les situations de surendettement pourraient être plus facilement détectées et des actions de prévention pourraient être activées.
L'association Crésus pointe également du doigt le fait que 60% des crédits sont distribués par deux grandes enseignes bancaires. Sans aller jusqu'au lobbying, on ne peut nier l'influence qu'ont ces banques à freiner la création d'un fichier positif qui aurait pour corollaire d'augmenter la concurrence entre banques (et abaisser les taux de crédit)et engagerait surtout leur responsabilité vis-à-vis des consommateurs.
Le nombre de personnes surendettées ne cesse d'augmenter : en 2010, 219 000 dossiers de surendettement ont été déposés à la Banque de France, largement plus que la moyenne annuelle enregistrée ces 5 dernières années (185 000). En deux ans, la proportion de dossiers irrémédiablement compromis, c'est-à-dire ceux qui se terminent par la faillite personnelle ou procédure de rétablissement personnel, a augmenté de 50%. La réforme du crédit était vivement attendue, mais son rôle protecteur pour le consommateur se trouve limité par les diktats économiques.