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Taxation de la plus-value immobilière : l'impasse politique.

La réforme de la fiscalité du patrimoine est un des chantiers à traiter pour le printemps prochain. L'idée centrale de supprimer l'ISF, l'impôt de solidarité sur la fortune, implique de compenser d'un autre côté le manque à gagner généré par cet impôt, à savoir 3,8 milliards d'euros. Sans vouloir toucher au patrimoine immobilier des Français qui, nous le rappelons, a doublé en dix ans, le gouvernement porte sa réflexion sur une taxation des plus-values immobilières réalisées sur la résidence principale. Haro des élus, de la majorité comme de gauche, qui mettent l'Etat en face de ses propres contradictions : vouloir ardemment une France de propriétaires et mettre en place des mesures incitatives en ce sens, et taxer en même temps un patrimoine que beaucoup se construisent tout au long d'un vie.

Le marché de l'immobilier a souffert de la crise financière, mais a toutefois réussi à se maintenir essentiellement grâce aux différentes mesures de soutien que le gouvernement avait mises en place en 2009. Une grande mesure a vu le jour en ce début janvier, le prêt à taux zéro + ou PTZ+, qui permet à tout primo-accédant sans condition de ressources de bénéficier d'un emprunt gratuit pour acquérir sa résidence principale. Avec seulement 58% de propriétaires, la France est en-dessous de la moyenne européenne (autour de 70%) et loin derrière l'Espagne (plus de 83%) ou la Belgique (79%). La crise du logement en France est une réalité qui se nourrit chaque année de la pénurie de logements dans certaines zones (Paris et la région francilienne) et de l'augmentation des prix en décalage avec le niveau des revenus.

La fiscalité sur les plus-values immobilières (hors résidence principale) a été modifiée le 1er janvier 2011. La loi de finances 2011 majore de trois points le taux d'imposition qui passe de 28,1% (16% + 12,1% de prélèvements sociaux) à 31,3% (19% + 12,3% de prélèvements sociaux). L'abattement de 10% au-delà de 5 ans de détention s'applique toujours, le bien étant totalement exonéré au bout de 15 ans. Le gouvernement voudrait aller plus loin en excluant les prélèvements sociaux de l'abattement annuel, ce qui revient à taxer à 12,3% les plus-values de tous les biens détenus depuis plus de 15 ans, résidence principale incluse.

L'idée ne convainc pas et met en colère bon nombre d'élus de droite comme de gauche. Pour beaucoup de ménages, acquérir sa résidence principale est le projet d'une vie, aucune optique de spéculation derrière. Devenir propriétaire est aussi le moyen de préparer sa retraite, une sécurité face à la perte de revenus à l'heure où le régime par répartition s'essouffle et où les placements financiers type assurance vie sont plus lourdement taxés. L'écho de mécontentement se répercute du côté des professionnels de l'immobilier qui voient dans cette perspective de nouvelle taxation un frein à la mobilité résidentielle et a fortiori professionnelle. Ceci aurait également pour effet pervers de bloquer le marché de la revente : quand on a acheté petit, on revend quelques années plus tard pour acheter plus grand. En taxant la résidence principale, le gouvernement ne ferait qu'amenuiser l'offre immobilière, déjà réduite comme peau de chagrin dans certaines régions, et provoquerait en parallèle une inflation des prix et un retour des dessous-de-table.

Le député UMP Jérôme Chartier, dans son rapport sur le projet, préconise de taxer uniquement les cessions supérieures à 1,2 million d'euros, une façon d'épargner aux classes moyennes un nouvel impôt à quelques mois de la campagne électorale pour les présidentielles 2012.